Traversée du désert ou cheminement nécessaire ?

Voici maintenant dix mois que j’ai enlevé mes talons de salariée pour chausser mes baskets d’entrepreneuse. Je me rappelle d’ailleurs des mots que j’avais écrits pour mon départ : « mes chaussures sont lacées (euh… j’avais orthographié « lassées » 🙄), mon sac est bouclé »… Je partais pour vivre une nouvelle aventure ! 

J’étais prête, j’avais tout planifié, tout prévu :  

  • Janvier : un peu de repos et création des outils de communication (Site web, page pro sur les réseaux sociaux…) 
  • Février : mise en place de l’offre et plan de communication,  
  • Mars : voyage au Cambodge pour me ressourcer, me « retrouver »
  • Avril : on se lance dans le grand bain ! (prospection, démarchage, etc…) 

Et bien rien ne s’est passé comme prévu ! Normal, la Covid a bouleversé tous les projets me direz-vous. Certes, c’est en partie vrai en ce qui me concerne — je ne suis pas certaine de partir au Cambodge avant longtemps et des contrats en passe d’être signés ont été annulés ou reportés —mais je ne chargerai pas le virus de l’entière responsabilité. J’en prends une bonne part. 

En fait, une fois lancée, je me suis très vite aperçue que cette aventure-là commençait avant tout par un chemin vers moi. Une découverte de celle que je suis au plus profond de mon être. Mon chemin forestier est devenu plus…aride. 

La Liberté : grisante et angoissante

Le premier chemin qui s’est ouvert à moi s’appelle Liberté. Celui-ci était attendu, c’était mon chemin forestier. C’est pour le parcourir joyeusement que j’ai décidé, à 50 ans, de me lancer dans une activité freelance. Ce à quoi je ne m’attendais pas c’est au changement rapide de paysage ! 

Le départ fut joyeux, presque euphorique. La Liberté étant une de mes principales valeurs, je me sentais pousser des ailes. Mais, très vite, je me suis aperçue que la Liberté était, pour moi, tout aussi grisante qu’angoissante. Où étaient passées les contraintes ? Pourquoi me manquaient-elles autant ?  

Force était de constater que ces contraintes que je fuyais étaient aussi mes repères, les arbres qui bordent le chemin. Elles jalonnaient ma vie, lui donnaient son rythme. Sans elles je me sentais perdue. J’étais seule maître à bord et devais poser mes propres balises, m’imposer un rythme, créer mes nouveaux rituels. Mes ailes se sont alors rabougries et mon enthousiasme s’est flétri… J’avais passé toute ma vie à respecter les consignes, les limites, les injonctions, de mes parents, de mes professeurs puis de mes patrons. J’ai passé mes 50 premières années à rester dans le cadre (ou ne pas trop en sortir 😉), comment gérer cette situation inconnue pour moi ? 

Je me suis alors accrochée à ce que je connais et ce qui m’a toujours permis d’avancer : les listes ! J’ai donc pris mon Goal Book (Bullet journal) et ai dressé des listes, des plans d’actions, des plans de communication, fait des plannings, écrit des routines, … Tout cela me rassurait mais… je ne passais toujours pas à l’action.  La Ms Finical (Mme Tatillon) qui sommeille en moi (mais toujours que d’un œil !) opérait. Alors, je relisais, révisais, corrigeais peaufinais, … et remettais à plus tard  

Je procrastinais. Quel vilain mot !  

La Procrastination : une amie à écouter

Et, comme tout bon « procrastinateur », j’étais une championne pour me trouver des excuses ! Trop fatiguée, pas d’inspiration, le confinement, et j’en passe. Cette petite voix, que j’appelle Ms Lazy (Mme Paresseuse), s’en donnait à cœur joie. A l’unisson avec Ms Finical, tout était prétexte à remettre mon projet professionnel à plus tard. 

Mais, lorsque Ms Lazy chante, Ms Harsh (Mme Sévère) n’est pas loin et se fait vite entendre. Elle est mon juge et mon bourreau personnel. Elle se régale de tempêter, juger et condamner. Je passais donc des jours entiers partagée entre ces deux voix dissonantes. Mes journées étaient une alternance de « on verra ça demain » et d’auto-flagellations. Assommantes, harassantes ! 

Épuisée par tout ce remue-ménage, j’ai fait appel à Ms Goodwill (Mme Bienveillance), celle qui apaise, écoute et comprend. Cette petite voix là a la capacité de trouver les mots pour mettre Ms Harsh en chômage partiel (Ms Harsh ne s’arrête jamais tout à fait). Elle lui explique qu’elle prend momentanément le relais auprès de Ms Lazy pour tenter de comprendre ce qui l’anime. 

À partir de ce moment, mon dialogue intérieur est devenu plus constructif, loin s’en faut. Je me suis questionnée sur les raisons de ce laisser-aller. Ms Goodwill a interrogé et écouté très attentivement Ms Lazy. Qu’avait-elle à me dire ? Quel besoin, quelle peur se cachaient derrière ses mots ? 

Tout simplement la peur de ne pas y arriver, de ne pas être à la hauteur de mes ambitions. Ms Lazy se sentait en danger et me protégeait en m’enfermant dans un cocon douillet. J’étais en plein doute. 

Cette prise de conscience, si peu réjouissante soit-elle, m’a rassurée. J’avais trouvé le point de difficulté, « mis le doigt là où ça fait mal » : je vivais le syndrome de l’imposteur. Passivement certes mais j’étais en plein dedans quand même. 

Le syndrome de l'imposteur : une réalité à ne pas négliger

J’avais déjà vécu cette expérience au cours de ma carrière. À chaque changement important de poste en fait. Des moments de doutes tellement puissants qu’on en arrive à remettre en question la confiance que l’on a placée en nous.  

Mais pourquoi maintenant ? J’étais tellement convaincue que ma voie était là ! J’avais lâché la sécurité d’un emploi stable pour donner plus de sens à ma vie et faire ce que j’aime vraiment.  

Pourtant je devais me rendre à l’évidence : je ne me sentais plus légitime dans cette voie et Ms Grumpy (Mme Râleuse) était là pour me le rappeler. Ms Grumpy c’est cette petite voix (oui, ça fait du monde !) qui vous dit sans cesse : « Comment as-tu pu croire que t‘en était capable ?« , “Tu n’as rien à faire là. Tu n’es pas à ta place.« , « Tu ne peux pas y arriver. Pour qui tu te prends ?. Elle est la porte-parole de l’imposture. 

Après plusieurs jours à tout remettre en question : ma capacité à travailler en freelance, à gérer les multiples casquettes de l’entrepreneur individuel, jusqu’à mes compétences de coach et de formatrice, j’ai à nouveau fait appel à ma bienveillante partenaire Ms Goodwill. 

Elle s’est empressée de rassurer tout le monde en mettant en place un plan d’action efficace avec mise en pratique immédiate : analyser et AGIR ! L’action étant le meilleur remède contre ce syndrome.  

– « Cela fait des mois que tu galères sur ton site internet ? Persévère, prends conseils, et tu y arriveras ! » 

– « Tu es inopérante sur les réseaux sociaux ? Fais-toi accompagner !«  

– « Tu n’es pas capable de proposer tes services ? Décroche ton téléphone et essaie !«  

– « Tu penses que tu n’es pas légitime en tant que coach ? Écris toutes tes expériences dans ce domaine et ancre en toi tes réussites ! » 

– « Tu n’y arriveras jamais ? Rappelle-toi que tu as relevé des challenges tout aussi difficiles. » 

– « Garde le cap et aie confiance en toi et en la vie. «  

 

Et vous savez quoi ? Ça marche super bien ! 

En fait, ce sentiment d’imposture est devenu ma plus grande force. Grâce à lui, j’ai pu finaliser mon site internet (Ms Finical le trouve perfectible mais je m’en contente pleinement 😊), j’ai appris à mettre en place une ligne éditoriale et un vrai plan de communication (et je continue de me former), les personnes que j’ai appelées m’ont toutes réservé un accueil des plus chaleureux, etc… 

Aujourd’hui, seule Ms Goodwill donne de la voix. Elle remercie toutes les autres pour m’avoir révélé mes peurs. 

Peut-être que certains penseront que cela fait beaucoup de « blabla » pour peu d’action. Je le comprends mais ne le partage pas. Ces dialogues intérieurs et ces moments de doutes m’étaient nécessaires. Ils m’ont rendue plus forte parce que plus ancrée dans ce que je suis, plus efficiente parce que plus consciente de mes failles à colmater et des forces sur lesquelles m’appuyer. Et le résultat c’est qu’aujourd’hui j’agis ! 

Le syndrome de l'imposteur : une réalité à ne pas négliger

Je vois cette période comme une sorte de “traversée du désert”. Une aventure qui semble quelque peu effrayante. Mais certains ne paient-ils pas pour des treks dans le désert justement ? Que recherchent-ils dans cette expérience ? Deux de mes amis y sont partis pour un trekking de 2 semaines et tous deux sont rentrés avec le sentiment d’être plus sereins, mieux “armés” pour reprendre le cours de leur vie et mener à bien leurs projets. 

C’est un sentiment que je partage aujourd’hui. Mon désert était différent, il était très personnel. Mes doutes étaient ses dunes. Mes remises en question, ses tempêtes de sable. Mes difficultés les brûlures de son soleil. Mes dialogues intérieurs, tantôt ses mirages tantôt ma boussole. Ma soif était celle d’être pleinement vivante et m’a poussée à avancer. 

Peut-être avez-vous trouvé dans ces lignes des similitudes avec votre propre expérience. Nous avons tous des déserts à traverser. 

Dans ces moments, restez attentif à votre dialogue intérieur, vos “petites voix” ont des choses très instructives à vous dire. Demandez-vous ce qui se cache derrière leurs mots. Quelles peurs ont besoin d’être calmées ? Quelles blessures demandent à être soignées ? Quels besoins nécessitent d’être comblés ? 

C’est en étant attentifs à nos émotions, à nos bavardages internes que nous avançons vers ce que nous sommes. Que nous trouvons l’oasis au milieu de notre désert. 

C’est en regardant les difficultés dans les yeux que nous pouvons analyser ce qui les a générées. C’est par l’analyse que nous trouvons les solutions et de nouvelles opportunités de grandir. Alors, notre traversée du désert n’est plus un parcours du combattant mais un chemin “initiatique”. 

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